Le 4 juillet dernier, une note des services de l’État inquiétait les syndicats et associations du secteur du handicap avec la possible fusion de la mission de l’Agefiph et du FIPHFP avec celle de Pôle Emploi.
S’il ne s’agit que pour l’heure d’une « piste de travail », le document a tout de même ravivé un questionnement nécessaire sur l’avenir de ces institutions destinées à favoriser l’accès et le maintien dans l’emploi des personnes en situation de Handicap.
Décryptage avec IDDHEA.
Une note de travail des services de l’État remarqué
Dans un communiqué de presse daté du 4 juillet, le syndicat « Force Ouvrière » lançait l’alerte sur un document « de travail » rédigé par les services de l’État remettant en cause le système d’accompagnement actuel de l’Agefiph en direction de l’emploi des personnes en situation de handicap.
En effet, le document pointé du doigt propose la disparition de l’offre d’accompagnement vers l’emploi opéré par l’Agefiph (pour le secteur privé) et le FIPHFP (pour le secteur public) dans le cadre du rapprochement Cap emploi et Pôle emploi. Avec une telle disposition, les fonds alloués aux structures par l’obligation d’emploi de 6% de travailleurs en situation de handicap seraient ainsi récupérés au profit de Pôle Emploi.
Il n’en fallait pas moins pour mettre le feu aux poudres et susciter de vives réactions du côté des associations. FO soulignant par ailleurs à quel point la disparition d’un organisme aussi majeur que l’Agefiph en termes d’emploi des personnes en situation de handicap serait « catastrophique ».
L’inquiétude est d’autant plus grande que Pôle Emploi intervient uniquement dans le domaine des demandeurs d’emploi. À juste titre, les acteurs du handicap se demandent donc quel serait le devenir des salariés pour qui les prestations de protection et de maintien dans l’emploi sont nécessaires, domaine d’action jusque là du ressort de l’Agefiph. La note des services de l’État ne précise rien à ce sujet.
Dans les faits, rien n’est encore décidé sur le rôle que serait amené à jouer l’Agefiph et le FIPHFP dans le cadre de ce rapprochement accru entre Pôle Emploi et Cap Emploi. Mais l’apparition de cette note des services de l’État laisse tout de même présager des changements futurs quant à l’accompagnement dans l’emploi des personnes en situation de handicap. Si le document n’a pas manqué de faire vivement réagir les différents acteurs du secteur (Agefiph, syndicats, organisations patronales, associations…), ce dernier a également le mérite de soulever des questions qu’il est nécessaire de se poser sur l’avenir de l’Agefiph.
Quel avenir pour l’Agefiph ?
La fonction première de l’Agefiph a toujours été de favoriser l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap dans le secteur privé. Mais en 2018, l’Agefiph a fait l’objet d’un rapport bien peu flatteur de la part de la Cour des comptes. Plus tard, ce fut au tour de l’inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l’inspection générale des finances (IGF) d’épingler l’organisme sur sa gestion. Suite à cela, l’Agefiph a dû procéder à une série de réformes en vue de redéfinir l’offre de service en collaboration avec le FIPHFP (Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique). Dans le même temps Cap Emploi, organisme lui-même financé par l’Agefiph en vue d’accompagner les personnes en situation de handicap vers l’emploi, avait opéré son rapprochement avec Pôle Emploi avec le succès que l’on sait, une réussite par ailleurs saluée par tous les acteurs.
Aujourd’hui, tout l’enjeu est donc de parvenir à construire un écosystème commun afin d’établir une répartition équitable des compétences entre l’Agefiph, Pôle Emploi et les acteurs chargés de représenter aussi bien les salariés que les employeurs. Pour atteindre cet objectif ambitieux, les représentants des organismes concernés en plus du FIPHFP travaillent actuellement à l’élaboration d’un catalogue de services commun. Une occasion alors de montrer la capacité de ces différents acteurs à sortir de leur cloisonnement respectif et d’affirmer la possibilité d’une construction commune.
Cependant, les associations du secteur du handicap se sentent mises à l’écart de ces discussions et craignent qu’aucune place ne leur soit laissée dans la « gouvernance de la politique d’emploi des personnes en situation de handicap ». Exclure les associations de la réforme serait pour le moins surprenant.
Le cap du gouvernement
Cette réforme reste dans la logique du cap amorcé par gouvernement qui souhaite inclure la politique du handicap dans le droit commun. Avec la mise en application des dernières mesures, les conseillers Pôle Emploi sont par ailleurs de plus en plus formés à l’accueil des personnes en situation de handicap. Une prérogative jusque là réservée à Cap Emploi et qui pourrait signifier la fin prochaine de l’organisme tel qu’il existe actuellement.
En ce qui concerne l’Agefiph et le FIPHFP, la poursuite de leur mission devra passer par une véritable revalorisation de leurs compétences, plus larges que celles de Pôle Emploi, en termes d’accès et de maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap. Malgré les efforts amorcés ces dernières années, la part de demandeurs d’emploi handicapés s’élevait à 514 000 personnes en 2018, soit une augmentation de 3,5 % par rapport à l’année précédente. Quant au taux de chômage de cette catégorie de population, celui-ci reste deux fois supérieur à celui de la moyenne nationale avec un taux à 19 %. Une évolution du fonctionnement des institutions apparaît donc bel et bien nécessaire.